Une marque à soi, c’est toujours une histoire de passion. Pour Augustine Level ça a commencé par la passion des plages. Les plus belles du monde si possible !
« Oïana Island est ma première marque, j’ai proposée la collection ‘Escale à Tahiti’ dès le printemps dernier. J’ai évidemment commencé à y travailler l’année dernière et je l’ai lancée en mars... Au moment du confinement en fait ». Un timing périlleux dont elle se sort à ce jour brillamment.
Forte d’un BTS en communication visuelle, elle suit d’abord des cours du soir à Esmod en 2012. Un aperçu des métiers de la mode qui lui permet de confirmer que c’est vraiment ce qu’elle rêve de faire. Elle n’entre complètement dans l’école qu’en 2013 afin de suivre une formation intensive en Stylisme et Modélisme puis une 3ème année diplômante. Elle sort d’Esmod en 2015.
Après son stage de fin d’études chez Sessun, dans le sud de la France, elle part aux États Unis : « Je voulais développer ma pratique de l’anglais, qui est indispensable dans cet univers. J’ai commencé par New York et j’ai un peu voyagé ».
En rentrant, elle travaille pour Marc Jacobs à l’organisation de show-room commerciaux durant les fashion week. Un travail temporaire qu’elle reconduit durant 3 ans. Une expérience qu’elle renouvelle aussi durant un an chez Loewe. Au contact rapproché des vêtements sa véritable passion pour la création se fait jour. « C’était vraiment mon envie personnelle pure, dans la mesure ou ni ma famille ni mes amis ne travaillent dans la mode ».
Planet Esmod : Pourquoi avoir commencé avec le maillot de bain ?
Augustine Level : C’est une pièce qui me fait rêver. J’ai toujours vécu dans le sud, et je passais tous mes étés au bord de la Méditerranée. Le maillot de bain est donc quelque chose que je maîtrisais bien. C’est une petite pièce minutieuse, qui correspond bien à ce que j’aime faire finalement. C’est comme un accessoire, et puis ça évoque la plage, les vacances, ça fait rêver non ?
C’est également léger, non seulement à porter, mais aussi en termes d’achat de matières et de stock. Ça ne demande pas un investissement financier aussi lourd qu’une collection complète de prêt-à-porter.
P. E. : Ce qui signifie que vous avez envie de développer une collection plus complète plus tard ?
A. L. : Oui, évidemment. L’envie est là. Déjà pour cet hiver j’aimerais proposer de sweat-shirt et d’autres accessoires.
P. E. : Pourquoi Oïana Island ? D’où vient ce nom ?
A. L. : Lors d’un voyage à Hawaï, j’ai rencontrée une petite fille sur une plage. Elle était venue m’offrir des coquillages et j’ai immédiatement sympathisé avec sa famille hawaïenne. Son prénom était Oïana.
P. E. : Commercialement comment ça marche ?
A. L. : J’avais un peu peur au début bien sûr, car en mars 2020 tout s’est arrêté. Mais j’ai épuisé tout mon stock à ce jour ! Bon, ce n’était pas un gros stock certes, mais ça m’a surprise quand même. Globalement j’ai surtout eu la chance de pouvoir travailler avec un atelier français, à Nice, qui m’a permis de partir sur des quantités raisonnables. Tout s’est vendu grâce aux réseaux sociaux finalement. C’est ma seule vitrine avec mon site internet. J’ai été moins chanceuse sur les salons commerciaux que j’ai faits à Cassis et à Saint Tropez. La plupart des commandes prises là ont été annulées.
P. E. : Quel était le thème de cette première collection ?
A. L. : Je me suis inspirée de mon premier voyage en Polynésie. J’ai dessiné un imprimé dans des coloris lagon, puis j’ai habillé mes créations de détails précis en lien avec la nature tahitienne. Il y a aussi des empiècements au crochet, plein de détails très minutieux.
P. E. : Plus globalement à quels critères répond votre marque ?
A. L. : Je me suis concentrée sur trois axes : la fabrication ‘Made In France’, une démarche globale écoresponsable et un bon sens des mélanges astucieux façon ‘Mix and Match’. Ainsi tous mes maillots sont réversibles. Quand on achète un modèle ce sont deux maillots différents que l’on peut porter. J’ai même un maillot quatre en un ! Un modèle que l’on peut retourner pour changer la couleur, mais que l’on peut aussi porter dos-devant et lacer ou délacer à volonté. En outre dans la ligne Oïana Island tous les tissus et les mailles, mais aussi le coton des détails au crochet et les étiquettes sont certifiés Okeo-Tex Standard 100. Chaque tissu est garanti sans produits toxiques pour le corps et l’environnement. J’aime aussi l’idée que mes maillots ne laissent pas de marques sur le corps. Trop souvent les maillots de bain ont des élastiques et des coutures trop serrés. Pas les miens ! Enfin la pochette dans laquelle je vends ces maillots est en voile de bateau recyclée. Chaque pochette est unique.
P. E. : Imaginez-vous deux collections par an ? L’hiver, ça doit être plutôt calme pour le maillot de bain, non ?
A. L. : Oui, mais ça me permet justement de me concentrer sur les finances. Et de travailler sur la suite : c’est à dire la collection qui sera mise en vente dès le printemps. Je fais tout seule pour l’instant, donc les périodes supposées plus calmes ne le sont jamais vraiment…
P. E. : Que vous a apporté votre formation à Esmod ?
A. L. : Cette formation a surtout développé ma sensibilité à la mode. Cela m’a aussi appris à m’attarder sur les détails. Les conférences de tendances m’ont également beaucoup servie. Et puis je ne connaissais rien à la couture, donc ça a développé mon œil sur la création. Mon regard a complètement changé sur les choses. Esmod m’a aussi appris la rigueur. J’essaye désormais d’être aussi organisée que possible à tous les niveaux, de la création à la production, en passant par tous les aspects commerciaux et financiers. Pour moi, le point fort de cette école c’est la rigueur.
P. E. : Quels conseils donneriez-vous aux actuels étudiants d’Esmod ?
A. L. : Il faut rester positif et croire en son projet. La concurrence est assez rude, donc il faut faire preuve de ténacité, s’accrocher. Lorsqu’on démarre, on passe souvent après les grandes marques, et les gens ne vous font pas de cadeaux. Il faut savoir créer une relation de confiance avec les façonniers, les fournisseurs, etc. Ne pas avoir peur de frapper aux portes. Et ne jamais considérer que c’est fini. Il y a toujours quelque chose à faire !
Globalement, il faut une bonne dose de ténacité, donc être passionnée car c’est sans fin. C’est d’ailleurs ce qui est génial dans la mode : ça ne s’arrête jamais. Même en vacances. Surtout lorsqu’on fabrique du maillot de bain…
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